Le deuil chez l’enfant
Solenne
7 janvier 2022

Sommaire
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À chaque âge sa perception de la mort et à chaque âge son expression du chagrin… Un adolescent, un enfant, mais aussi un nourrisson, chacun peut vivre un deuil. L’accompagner en telle situation s’avère essentiel. En effet, un enfant doit être « impliqué » dans un deuil familial, en particulier en cas de décès d’un membre de sa propre famille (père, mère, frère ou sœur, grands-parents).
Comment parler de la mort avec un enfant ? Quels sont les leviers pour l’aider à surmonter un deuil ? Les équipes de Roc Eclerc ont pris conseil auprès de Delphine Letort, psychopraticienne certifiée en accompagnement du deuil et fondatrice de Histoires de vie, afin de poser des questions et d’aborder ces sujets avec, pour toile de fond, l’espace de parole nécessaire au travail du deuil de l’enfant.
L’appréhension de la mort et le processus de deuil chez l’enfant
Chaque deuil est unique. Il diffère, en effet, d’un individu à l’autre, en fonction de son âge et de sa personnalité, de son environnement et des circonstances entourant le décès, mais aussi de nombreux autres facteurs.
Tristesse, colère, sentiment d’injustice ou encore d’insécurité… les réactions d’un enfant endeuillé, son chagrin ou son absence de pleurs, sont parfois difficiles à comprendre pour un adulte. Nous allons évoquer, dans un premier temps, la manière dont un enfant peut vivre un deuil.
Le deuil durant la petite enfance (moins de 3 ans)
Du fait de son jeune âge, un enfant de moins de 3 ans n’a pas la compréhension intellectuelle de la fin de vie et de la mort, de la finitude. En revanche, il ressent le chagrin de son entourage. Il est sensible à la séparation, à la perte de l’être aimé qu’il peut percevoir comme un abandon.
Un tout-petit va notamment manifester son anxiété et son malaise en pleurant plus que d’ordinaire, en refusant de manger ou de dormir. Pour ses parents, il est important de le réconforter et de le cajoler, de le maintenir dans un environnement familier et sécurisant.
Le deuil durant l’enfance (entre 3 ans et 12 ans)
Un jeune enfant a une certaine curiosité pour la mort. Cette dernière est souvent perçue comme un long sommeil ; elle est donc réversible. Comme dans les jeux vidéo ou les dessins animés : une personne peut mourir puis revivre, mourir de nouveau. Les plus jeunes pensent que la mort n’est pas naturelle et qu’elle s’attrape. Il y a donc un coupable et, pour certains, elle peut même être leur faute. Confronté au décès d’un parent ou d’un proche, un enfant peut également craindre que d’autres membres de sa famille disparaissent.
À ces âges, un enfant a besoin d’être rassuré sur ce sentiment d’abandon mais aussi, et surtout, d’avoir un espace de parole, au sein du foyer ou à l’extérieur.
Le deuil durant l’adolescence (entre 13 ans et 17 ans)
Au fil des années, l’idée que se fait un enfant puis un adolescent de la mort évolue. Celui-ci prend conscience qu’elle est irréversible, mais aussi universelle. Un adolescent comprend parfaitement la notion de mort et tout ce que cela implique. Mais, dès lors qu’un décès familial survient, il le vit comme une aberration. C’est pour lui une période de double deuil : deuil de son enfance et deuil de la personne décédée.
Un adolescent va réagir différemment face au décès d’un parent ou d’un proche : retraite mutique, comportement agressif ou violent, attitude teintée d’indifférence… Ses parents doivent être présents pour lui, c’est-à-dire l’aider à identifier, à légitimer et à gérer ses émotions.
L’accompagnement de l’enfant en deuil
Un enfant perçoit les bouleversements au sein de son environnement. Son comportement et son attitude peuvent être déroutants parfois pour les adultes : il va être triste par intermittence, continuer à jouer comme s’il n’était pas affecté par le décès… Mais, même s’il semble dans le déni, l’enfant vit son deuil de l’intérieur, à sa manière.
Apporter des éléments de réponse et accompagner un enfant confronté à un deuil est déterminant. Les non-dits sous prétexte de le protéger peuvent entraîner des répercussions (stress, anxiété, dépression…). « Tout ce qui ne s’exprime pas s’imprime » (Jacques Salomé). C’est pourquoi, parler avec lui et l’écouter, nommer et partager ses sentiments, conserver une certaine routine, tout cela est indispensable pour aider l’enfant à vivre son deuil.
Celui-ci a besoin de connaître la vérité, de se sentir rassuré et soutenu en de telles circonstances. Sans qu’il soit question de forcer la parole ou l’expression des émotions, il doit avoir un espace de parole – au sein de son foyer et, si ce n’est pas possible ou trop éprouvant pour les parents, auprès d’un tiers.
La participation de l’enfant aux obsèques
Après le décès d’un proche ou d’un parent, la question de la présence aux obsèques de l’enfant (à un jeune âge comme à l’adolescence) se pose. Il est important, là encore, de communiquer avec lui. Il doit pouvoir décider d’y participer ou non. Bien sûr, il est nécessaire de lui donner des repères et des informations, avec des mots simples et explicites : le renseigner sur l’organisation des funérailles (le funérarium, la cérémonie d’hommage, le principe de l’inhumation ou de la crémation), lui expliquer la signification des rites funéraires, mais aussi le prévenir de la charge émotionnelle (la grande tristesse des personnes adultes présentes, le chagrin qu’il pourra ressentir lui-même). Voir le défunt et/ou prendre part aux obsèques peuvent aider l’enfant à intégrer la réalité du décès. Aussi, dès lors qu’il exprime le désir d’assister aux funérailles, il est primordial de respecter sa volonté.
L’enfant doit pouvoir vivre son deuil, dire et nommer ses émotions. Lui donner les outils pour s’exprimer et un espace de parole l’aideront dans ces moments difficiles, pour laisser place à un avenir délesté de ce poids qui pourrait faire reviviscence un jour ou l’autre.